mardi 22 février 2011

Review on Metal Sickness ( french )

A première vue, les Modern Funeral Art, on miserait pas la paie du mois dessus : un artwork aussi accrocheur qu’une brochure Pôle Emploi, un nom à chier (subjectivité j’écris ton nom), un chanteur visiblement pas super aguerri et un opener qui la laisse molle… C’est mal barré. Et puis arrive la deuxième piste de ce "Doom With a View", comme un bref afflux sanguin à la tête, et on mouille direct la dentelle. Un riff gros comme la terre vous explose le citron, doublé d’une ligne de piano simple et délicate, le cocktail parfait pour remuer les tripes et accessoirement faire oublier la maladresse du chant et le trigg en carton.




"Doom With a View" au moins ça trompe pas sur la marchandise : c’est effectivement du doom, et la référence au film romantique de James Ivory "Room With a View » (et non pas à l’album d’Henri Salvador « chambre avec vue » ENFIN JE PENSE) vous plonge dans le spleen de l’Angleterre victorienne. Une équation simple, sans inconnue, se dessine alors devant vos yeux : doom + anglais + romantique = My Dying Bride. Bien vu ! Largement tributaire du triumvirat du doom anglais des années 90, MFA reboost cette musique de lopette pleurnicharde avec une science sûre de la composition, une disto grasse et un talent particulier pour pondre des plans accrocheurs à la simplicité désarmante.



Derrière cette simplicité des riffs lourds et des arrangements qui sonnent comme des évidences, la musique de MFA est le creuset d’influences multiples combinées avec maturité : là on capte une ligne mélodique à la Paradise Lost ("Alexander"), ici une harmonie à la My Dying Bride ("Friends of Hell"), un riff purement sabbathique ("Around the Graves"), un gros passage massif et mélodieux à la Supuration ("Sol Invictus")… un beau faisceau doom tout en nuances de noir lié par une ambiance froide, résolument gothique. Pas une longueur, pas une goutte à côté, l’album s’écoute comme on liquide un paquet de mikados grâce à la capacité du groupe à synthétiser sur une petite dizaine de titres toute la variété du style qu’il affectionne tant. MFA explore le metal lourd et dramatique depuis ses racines heavy et post-punk jusque ses ramifications dark metal et offre avec ce deuxième album un panorama épique de cette musique.



Le temps d’une courte pause ("Mary Jane Kelly"), le trio délaisse la grosse distorsion pour une balade sans batterie où les guitares feutrées portent la voix d’Arnaud, étonnamment belle et juste, dont le timbre évoque un Ozzy Osbourne apaisé sur des paroles décrivant paradoxalement une boucherie sadique. Là encore c’est banco.



Elément central de "Doom With a View", le chant d’Arnaud caractérise d’entrée de jeu la galette et lui donne une bonne partie de sa fraîcheur et de sa saveur grâce à son timbre et au souci mélodique constant. Malheureusement il constitue en même temps un lourd handicap pour l’album : jeune, frêle, mal assuré, c’est clairement l’expérience qui manque ici ("Sol Invictus", "Friends of Hell" : aïeaïeaïe !) et, manque de bol, le mix le met clairement en avant, tellement en avant qu’il sonne bizarrement, comme posé à l’arrache sur les autres instruments qui forment eux une masse homogène et bien travaillée.



MFA serait-il touché du "syndrome de Remorse" (le "Crowpath français") ? à savoir des morceaux géniaux qui passent à côté de leur cible à cause de choix de production malheureux, ou d’un manque de volonté sur ce plan. A cet élément près, "Doom With a View" est un pur bijou de doom personnel, varié et accrocheur, mais voilà : le traitement du son est pour beaucoup dans le plaisir de l’écoute et force est d’admettre que MFA n’a pas mis toutes les chances de son côté en bâclant cette étape.

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